Contentieux, pénal, compliance : à la croisée des chemins

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Contentieux, pénal, compliance : à la croisée des chemins

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Il n’est pas rare que des pénalistes exercent en contentieux commercial. Depuis quelques années, certains d’entre eux ont également élargi leur activité pour traiter les questions de compliance.

Les avocats qui exercent en contentieux commercial et en droit pénal des affaires ne sont pas d’étranges spécimens. Il suffit de jeter un œil aux classements de Décideurs pour constater que cabinets français comme Bredin Prat, Darrois Villey Maillot Brochier ou encore Veil Jourde excellent dans ces deux domaines du droit, avec des associés capables d’être sur chacun des fronts.

 

Même si toutes les structures ne sont pas présentes sur chacun des segments, cette double pratique et la transversalité des matières sont connues. Depuis quelques années, notamment avec la loi Sapin 2, un autre domaine est également venu se greffer au pénal dans la plupart cabinets d’affaires : la compliance, à savoir la mise en conformité des organismes publics et privés afin d’éviter les risques de poursuites judiciaires.

 

"Le mieux placé pour faire de la compliance est celui qui sait comment un dossier répressif peut se terminer quand il tourne mal : donc celui qui connaît les procédures pénales et réglementaires", explique Emmanuel Moyne, avocat fondateur de Bougartchev Moyne Associés. On connaît les réactions des autorités de poursuite. On sait ce qu’il ne pas faire et comment s’organiser pour l’éviter. » Un constat confirmé par son associé, Kiril Bougartchev : "Les avocats peuvent guérir mais ils peuvent aussi prévenir, par exemple en aidant leurs clients d’une part à contrer les risques de blanchiment ou de corruption et, d’autre part, à détecter les fraudes. Il est toujours plus simple d’expliquer aux juges, quand un sujet se fait jour, que des systèmes pertinents ont pourtant été mis en place."

 

Et Édouard Steru, avocat associé chez Steru Baratte de renchérir : "En matière pénale, les entreprises s’orientent de plus en plus vers la prévention, ce qui peut passer par la réflexion sur l’organisation interne du management via les délégations de pouvoirs, ou par des cartographies des risques."

 

Qu’en est-il du contentieux ? "Éviter le contentieux, c’est avant tout identifier les risques. Réfléchir à l’architecture contractuelle et rédiger les contrats en anticipant les nids à contentieux et les points de blocage est essentiel. Mais le contentieux peut venir de partout et parfois sur de sujets inattendus. Notre métier consiste alors à le désamorcer et le cas échéant à gérer les litiges en minimisant autant que possible l’aléa judiciaire", indique Édouard Steru.

 

Certains cabinets, comme Darrois Villey Maillot Brochier, ne font pas de la compliance une pratique à part entière. "Nous intervenons dans ce domaine pour nos clients car nous les accompagnons sur tous les aspects qui peuvent être pénaux, et l’enquête interne peut aboutir à l’identification d’une infraction, commente Christophe Ingrain, associé. Et d’ajouter : "L’enquête interne a d’abord et avant tout pour objectif d’éclairer le management sur la réalité d’une situation et le cas échéant sur les mesures à prendre. Nos clients nous demandent de nous en charger car la relation avec son avocat est, particulièrement au pénal, une relation de confiance."

 

Quel impact sur les recrutements ?

 

Si certains cabinets n’en font pas, c’est essentiellement pour ne pas avoir à se positionner en autorité de poursuite et ensuite, si le besoin s’en fait sentir, en tant qu’avocat de la défense. Mais cette posture n’est pas la plus répandue.

 

D’ailleurs, Ian De Bondt, directeur associé de Fed Légal, note le nombre croissant de recherches de profils de pénalistes capables de travailler sur des programmes de compliance, des enquêtes internes et des investigations internationales : "Aujourd’hui, les grands cabinets disposant d’une équipe en pénal des affaires sont très sollicités par leurs clients sur ce type de problématiques liées à la fois à la loi Sapin 2 mais aussi et surtout à l’internationalisation du droit pénal. Que les cabinets disposent d’une clientèle d’institutions financières faisant face à des sujets de financement du terrorisme ou de blanchiment, ou de groupes industriels susceptibles de devoir faire face à des enquêtes pour des faits de corruption engagées par le Parquet national financier ou des autorités étrangères comme le Department of Justice américain ou le Serious Fraud Office britannique, c’est désormais un positionnement stratégique pour tous."

 

Cette nouveauté correspond-elle aux attentes des collaborateurs ? "Ces types de dossiers, de compliance pure et/ou d’investigation, sont très chronophages et volumiques, ce qui peut parfois poser un problème vis-à-vis de collaborateurs qui n’ont pas forcément choisi le droit pénal pour évoluer sur de telles problématiques. Pour beaucoup, s’ils y voient une manière d’internationaliser leur cursus et de s’ouvrir au monde de l’entreprise, ils souhaitent ne pas perdre leur fibre contentieuse et leur attrait pour les joutes pénales", précise Ian De Bondt.

 

Les cabinets doivent donc trouver le bon équilibre entre le service aux clients et l’intérêt de leurs collaborateurs pour que les dossiers soient traités de la manière la plus efficace possible.

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