L’Observatoire du Conseil National des Barreaux a publié la troisième édition de son cahier statistique « Avocats : évolutions et tendances de la profession ». On y apprend les principaux chiffres clé.
En 2011, on recensait en France 54 000 avocats, dont près de la moitié étaient rattachés au barreau de Paris ! Depuis 2000, le nombre d’avocats augmente en moyenne de 3,6% par an.
Ces chiffres alarment le bâtonnier de Paris, qui souhaite imposer rapidement des mesures provisoires afin de limiter cette augmentation.
Selon
Christiane Féral-Schuhl, « La
profession doit en effet se mobiliser sur cette question. C'est un
sujet majeur. Si nous ne faisons rien, dans cinq ans, 10 000
nouveaux avocats seront présents en plus des 24.000 professionnels
parisiens. Je ne suis pas favorable au numerus clausus, mais on ne
peut pas rester les bras croisés. Plusieurs pistes peuvent être
explorées. Comme celle d'un examen national plus sélectif. Ou la
création d'une grande profession du droit. Mais cela ne suffira pas.
En attendant, il faut prendre des mesures provisoires limitant
l'arrivée de nouveaux avocats sur le marché pendant quelques
années. »
Pour
le bâtonnier, il ne faudrait donc pas nécessairement instaurer un
système de numerus clausus, mais durcir les conditions d’entrée
au concours du barreau. Cela aurait donc pour conséquence de réduire
considérablement le nombre d’élèves avocats et par extension le
nombre d’avocats. Toutefois, il faut prendre en compte le fait que
le concours d’entrée à l’école du barreau est déjà assez
sélectif puisque les candidats doivent obtenir la note minimum de 10
sur 20.
L’instauration d’un numerus clausus peut paraître contestable dans la mesure où les études en droit, et les étudiants dans cette filière ne pourront qu’approuver, sont déjà une sélection en elles-mêmes. En effet, franchir le cap de la première année est déjà difficile, sans compter sur le passage en Master 1 qui, selon les universités, nécessite l’étude approfondie d’un dossier, pour au final ne sélectionner que les meilleurs candidats.
Mais la sélection la plus rude est sans doute celle du passage en Master 2, pour lequel certains UFR ne sélectionnent que les étudiants ayant obtenu une mention. Rajouter à tout cela un numerus clausus pour l’entrée à l’école du barreau est sans doute une bonne solution pour effrayer les étudiants et réduire considérablement le nombre d’avocats en France. Encore faut-il se pencher sur la question et savoir ce qu’engendrerait une diminution conséquente d’avocats en France.
Cependant,
comme le souligne Arnaud Gossement, avocat, il faut prendre une
précaution particulière lorsque l’on s’attarde sur les
chiffres. En effet, si le nombre d’avocat augmente, il faut
comprendre qu’un étudiant fait souvent le choix de ce diplôme
pour intégrer un poste à responsabilités juridiques au sein d’une
grande enseigne. Force est de constater, sur les offres d’emploi,
que pour les profils de directeurs juridiques, de juristes, il est
souvent demandé aux candidats d’avoir obtenu le concours
d’avocat.
Ainsi,
dire qu’il y a trop d’avocats en France est une affirmation à
relativiser. D’autant que la crise frappe tous les métiers sans
exception. Aujourd’hui, de nombreux avocats fraichement diplômés
passent directement par la case Pôle Emploi. Mais ce n’est pas une
nouveauté, les employeurs préfèreront toujours les étudiants
titulaires du plus grand nombre de diplômes, avec mention de
préférence, mais le choix d’un candidat se fait aussi en fonction
de l’expérience professionnelle qu’il a accomplie au cours de
ses études. Il est vrai qu’il est difficile pour un étudiant en
droit de conjuguer un stage avec les cours, d’autant que tout au
long des études en droit, le stage ne devient obligatoire qu’en
cinquième année !
Une solution qui devrait sans doute être envisagée serait celle de proposer davantage de cursus en droit pouvant s’effectuer en alternance, dans le cadre d’un contrat de professionnalisation par exemple. Aujourd’hui en effet, les universités proposant ce type de contrats sont rares, et parmi celles qui le proposent, ces contrats ne concernent que le Master 2.
La
commission réserve dans son rapport un titre I « une
profession d’avocat élargie et rénovée », dans lequel elle
propose d’élargir les missions de l’avocat.
L’une
des propositions a abouti puisqu’il s’agit de la suppression
totale de la profession d’avoué, missions duquel sont désormais
dévolues à l’avocat, qui a pris effet depuis le 1er janvier
2012.
Elle
propose également de fusionner la profession de conseil en propriété
intellectuelle avec celle de l’avocat. En outre, elle se penche sur
la question de l’avocat d’entreprise, question qui a fait l’objet
d’un rapport remis le 20 février 2012 par la Chancellerie aux
instances représentatives des avocats.
La mesure innovante réside dans la volonté d’instaurer l’acte contresigné par l’avocat. Si les avocats s’opposent vivement à la confusion avec la profession de conseil en propriété intellectuelle, en revanche ils ne s’opposent pas à la possibilité de pouvoir rédiger des actes authentiques. Au contraire, ils la réclament.
Cette proposition permettrait aux parties de s’adresser à un avocat en tant que conseil, et celui-ci serait alors habilité à renforcer le pouvoir des actes sous seing privé en les contresignant. Comme le rappelle la commission, il n’existe pas en droit français de moyens pour donner à l’acte sous seing privé une force comparable à l’acte authentique délivré par le notaire : « Le législateur a cherché par le passé à remédier à cette situation mais les solutions imaginées sont insuffisantes : elles ne tiennent pas lieu de conseil juridique et ne concernent pas certains actes pourtant importants (tels la location ou la vente de meubles, les investissements financiers). » La commission propose d’inscrire ces dispositions dans la loi du 31 juillet 1971 portant réforme de certaines réformes judiciaires et juridiques, en la complétant par l’article suivant :
« Le
contreseing de l’avocat de chacune des parties sur un acte sous
seing privé atteste que l’avocat a pleinement éclairé la partie
qu’il conseille sur les conséquences juridiques de cet acte. Par
son contreseing, l’avocat garantit la pleine validité et la pleine
efficacité de l’acte à la partie qu’il conseille sur la base
des informations qu’elle lui a communiquées.
L’acte
sous seing privé contresigné dans les conditions ci-dessus est
légalement tenu pour reconnu au sens de l’article 1322 du Code
civil.
Lorsqu’il intervient comme conseil ou rédacteur unique,
le contreseing de l’avocat emporte les conséquences définies
ci-dessus à l’égard de toutes les parties à l’acte.
Lorsqu’il
est apposé dans les conditions ci-dessus, le contreseing de l’avocat
se substitue à la mention manuscrite exigée par la loi, sauf
disposition légale spécifique.»
En définitive, pour les étudiants qui souhaitent devenir avocat ou hésitent encore, il serait préférable de se décider rapidement, avant qu’un numerus clausus ou d’autres mesures restrictives ne soient imposées.
- Site
du Ministère de la Justice
- Article
"La disparition de l'avoué des métiers du droit"