Comme toute entreprise, les cabinets d’avocats ne peuvent ignorer l’influence des réseaux sociaux. La puissance de ces derniers peut-elle néanmoins aller jusqu’à permettre aux avocats de conquérir de nouveaux clients ? Selon un article publié par les Echos le 24 février dernier, cette perspective « ne relève plus du fantasme ». Laetitia Avia associée du cabinet Deprez Perrot aurait notamment décroché un nouveau dossier, suite à une conversation privée sur Facebook. L’exemple en question semble aussi réaliste qu’anecdotique. Lorsque nous posons la question à des avocats, ceux-ci nous répondent sans équivoque que les réseaux sociaux permettent bien de développer leur visibilité mais n’entrent pas dans une logique de conquête. « Beaucoup d’avocats sous-estiment le rôle de la communication dans leur business développement », nous explique à ce sujet Cyril Chassaing, associé d’Enderby, un des principaux cabinets de conseil en stratégies de communication spécialisé dans les métiers de conseil, notamment les avocats. « Nous sommes de plus en plus amenés à faire comprendre à nos clients la nécessité de s’investir dans les réseaux sociaux. » Certains avocats refusent catégoriquement de voir les réseaux sociaux comme de potentiels puits de business. Les freins sont multiples. Selon Delphine Jouenne, également associée du cabinet Enderby, le premier des freins est le manque de temps, auquel s’ajoute un certain conservatisme inhérent à la profession. « Les avocats estiment encore trop régulièrement qu’ils ne peuvent pas gagner de nouveaux clients via les réseaux sociaux car ces derniers ne les utilisent pas » souligne-t-elle. Si les sceptiques existent, les avocats totalement hermétiques quant à une présence sur le Net et les réseaux sociaux se font de plus en plus rares. Impulsés par des grands cabinets anglo-saxons comme Landwell, qui ont su développer des réseaux impressionnants, nombreux sont les cabinets français, toutes tailles confondues, à suivre cette « mode ».
L’utilisation quotidienne et professionnelle de ces réseaux nécessite d’en comprendre et d’en accepter les codes. Les réseaux sociaux professionnels Linkedin et Viadeo sont des outils BtoB. Alors que le géant américain Linkedin s’adresse plus aux cadres dirigeants, son petit frère français Viadeo est plus utilisé pour des cabinets de région dans une sphère locale. Egalement outil de BtoB, Twitter permet une veille efficace sur l’actualité sectorisée. Son utilité en matière de conquête de clients est néanmoins peu probable. Nous avons interrogé des avocats parmi les plus actifs de la « twittosphère » et pour une majorité, leur réponse est claire. « Je ne suis pas là pour ça », nous explique @MaitreZenqam. « Pas de clients pour ma part, mais des postulations pour les confères », nous confie @Maitre_Bauer, avocat à Bordeaux. @MaitreMo, qui comptabilise pour sa part plus de 24 400 abonnés nous répond néanmoins avoir acquis deux clients sérieux sur une soixantaine de demandes extravagantes. De son côté, Facebook, premier réseau social mondial, est plus un outil BtoC. Ses utilisateurs n’y recherchent pas d’informations précises en matière de business. Il faut donc rester dans la communication « légère », assurer une présence. Si certains doutent de l’utilité en matière professionnelle du roi des réseaux sociaux, son fondateur a récemment rappelé que plus de deux millions d’entreprises dans le monde font confiance à Facebook pour leurs campagnes publicitaires. « Pour les cabinets d'affaires, Facebook est davantage un outil de communication RH qu’un moyen de communication lié au business » nous confirme Cyril Chassaing. Les réseaux sociaux permettent donc aux cabinets de développer leur esprit de marque, et ainsi d’attirer les jeunes talents. La tendance ne touche pas que les avocats. De façon globale, 53% des recruteurs utilisent les réseaux sociaux aussi bien pour chasser des candidats, que pour travailler la marque employeur de l’entreprise.
Dans cette marée d’informations, de réseaux, de nouveautés, l’essentiel est de garder en tête que les réseaux sociaux, utilisés à bon escient, sont des atouts. « Les avocats doivent placer le curseur pour choisir les bons réseaux sociaux. Ceux-ci ne remplacent évidemment pas le système classique du networking. Ils en sont simplement une composante nouvelle avec laquelle ils doivent désormais apprendre à composer », conclut Cyril Chassaing. Ils sont donc une corde à l’arc de l’avocat pour une meilleure visibilité, une image de marque qualitative, et un recrutement performant. La conquête de nouveaux clients, aussi minime soit-elle par cette voie, n’en est finalement que la conséquence logique.
Capucine Coquand