Mathieu Lhoumeau (Concord) : « Nous voulons devenir le Salesforce du contract management »

Mathieu Lhoumeau (Concord) : « Nous voulons devenir le Salesforce du contract management »

Avec 35 000 entreprises utilisatrices dans le monde entier, Concord a réussi à conquérir le marché du contract management en à peine deux ans. Création, négociati

Avec 35 000 entreprises utilisatrices dans le monde entier, Concord a réussi à conquérir le marché du contract management en à peine deux ans. Création, négociation, signature, suivi, renouvellement... la plateforme lancée fin 2013 permet de suivre un contrat durant tout son cycle de vie.

 


 

De passage à Paris pour rencontrer des directeurs juridiques du CAC 40, Mathieu Lhoumeau, co-fondateur et PDG de Concord, nous a accueillis dans les bureaux parisiens de cette jeune startup, désormais américaine, qui révolutionne la gestion des contrats d’entreprise. Entrepreneur dans l’âme, Mathieu crée sa première société à 17 ans, profitant des débuts d’internet, revendue deux ans plus tard à un grand groupe de télécommunications. Diplômé (entre autre) de Science-Po et HEC, il sera en mission auprès de l’ancien président N. Sarkozy lors de sa campagne de 2007 puis de grands PDG tels que Xavier Niel.

 

La plateforme Contract Live voit le jour en 2010. C’est un premier pas dans l’univers des services liés au contract management, pour lui et son associé Florian Parrain. Il leur permet de mieux comprendre le marché et de lancer trois ans plus tard Concord, première plateforme en ligne permettant la gestion de contrat à chacune de ces étapes.

 

 

Carrières-Juridiques.com. Quel est le service proposé par Concord ?

 

Mathieu Lhoumeau. Concord réunit de manière native tous les éléments qui permettent à une entreprise de suivre ses contrats dans toutes leurs étapes de vie.  Le contrat est créé et modifié en ligne par les parties. Un chat remplace les e-mails et les versions peuvent être comparées entre elles. Avec le suivi des modifications, il est impossible de travailler sur une mauvaise version. C’est très important en termes de sécurité. Dans dix ans, en cas de problème, toutes les modifications faites et tous les messages échangés seront disponibles sur Concord pour prouver l’intention des parties devant un juge.

Une fois le contrat prêt, les parties peuvent gratuitement apposer leur signature électronique. Le contrat sera classé sur leur espace et Concord se chargera d’envoyer des rappels.

 

 

C-J.com. Comment vous est venue l’idée d’un tel projet ? 

 

M. L. Il y a six ans, je travaillais auprès du PDG d’un grand groupe français qui m’a chargé de renégocier 500 contrats avec 500 fournisseurs. Après les avoir recherchés et relus un à un, j’ai rempli un tableau Excel de cinquante-deux colonnes sur cinq cents lignes. Puis je me suis retrouvé à envoyer des fichiers word dans tous les sens. Au final, on ne sait plus qui a modifié quoi, comment, pourquoi, et à quel moment. J’ai passé six mois de ma vie sur ces contrats. 

Pourquoi une boite qui fait 5 milliards de chiffres d’affaires gère ses contrats à la main, ce qui fait perdre du temps et de l’argent lorsqu’on manque une échéance ? Avec mon associé, nous avons commencé à réfléchir sur une plateforme dédiée au contract management.

Nous avons lancé en 2010 une première plateforme Contract Live, avant de mettre sur pied Concord fin 2013. Aux Etats-Unis il y a une théorie selon laquelle il faut passer dix milles heures sur un sujet pour devenir un expert, c’est ce qu’on a fait sur les trois premières années avec Contract Live. Rapidement avec Concord des entreprises importantes sur le marché nous ont fait confiance (Bosh,  Siemens, Lagardère, ou Free). Nous avons trouvé le product market fit[1] nous permettant de faire une seconde levée de fonds de 2.7 millions de dollars.

 

 

C-J.com. Et maintenant, où en êtes-vous ?

 

M. L. Aujourd’hui, Concord est utilisé par 35 000 entreprises ayant leur siège dans 130 pays différents. C’est une plateforme sophistiquée mais restant d’une simplicité redoutable. L’entreprise a doublé de taille en 6 mois dû à notre modèle économique unique. Nous sommes les seuls au monde à offrir, gratuitement et en illimité, la signature électronique. Les fonctionnalités avancées sont accessibles à partir de 25€ mensuels par utilisateur.

Le juridique est le dernier bastion d’une entreprise n’ayant pas été informatisé correctement. Les entreprises ont des logiciels pour gérer tout le reste. Les directeurs juridiques commencent à se rendre compte de leur retard et veulent être perçus comme des vecteurs de changement et d’amélioration dans la course à la modernisation des entreprises. Spontanément, ils vont donc essayer d’innover pour simplifier la vie de tout le monde.

Nous souhaitons que dans dix ans toutes les entreprises auront un logiciel de gestion de contrat. Actuellement, 95% des entreprises dans le monde gèrent manuellement leurs contrats. C’est 150 Milliards de dollars de perdu par an rien que sur cette problématique. Il y a eu la même évolution avec la gestion de client avec Salesforce. Nous voulons suivre ce modèle et devenir le prochain SalesForces pour les contrats.

Nous continuons d’améliorer la plateforme qui est déjà très puissante. Il est par exemple possible de faire du publipostage de contrats et d’avoir en un clic, trois cent contrats générés. A la fin du mois d’août, nous aurons aussi un nouveau moteur de recherche similaire à Google.

 

 

C-J.com. Les entreprises sont-elles frileuses à l’idée d’avoir une gestion en ligne de leurs contrats ?

 

M. L. Pas du tout ! Je dis souvent que mon premier métier avant même de faire du développement de logiciel c’est de faire de la sécurité. Par définition les contrats sont les données les plus confidentielles d’une entreprise. Notre plateforme est robuste et nous sommes régulièrement audités. Les contrats restent confidentiels et nous avons un serveur par continent pour séparer les données. On a fait beaucoup d’efforts pour montrer « patte blanche » ce qui nous permet de travailler facilement avec de grandes entreprises.

 

 

C-J.com. La nouvelle règlementation européenne eIDAS[2] entrée en vigueur le 1er juillet va-t-elle vous impacter ?

 

M. L. L’avantage d’avoir commencé Concord en France est que notre règlementation est la plus stricte. Notre modèle est donc universel, mais cela a nécessité beaucoup de travail et de nombreuses vérifications juridiques. L’effet constaté est d’avoir des clients rassurés grâce à l’évangélisation de la signature électronique.

 

Valérie CROMER

@valerie_cromer

 


[1] Le Product Market Fit est l’accord parfait entre un produit et son marché, une évidence d’achat. Un « fit » parfait c’est le fait que votre cible comprenne votre produit, qu’elle l’achète et qu’elle en parle autour d’elle pour vous recommander.

[2] Règlement n ° 910/2014 du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 2014 sur l’identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché intérieur et abrogeant la directive 1999/93/CE