La société en nom collectif (SNC) Invest OM 103 souhaite obtenir le bénéfice de la réduction d’impôt de l’article 199 undecies B du Code général des impôts pour les investissements productifs neufs outre-mer [2]. À cette fin, elle prétend avoir acquis de deux fournisseurs du matériel de perliculture, matériel qu’elle aurait ensuite loué à une société. La SNC obtient ainsi le remboursement de la TVA grevant l’achat de ces biens au titre des années 2007 à 2010 au vu des factures des fournisseurs. Toutefois, l’administration fiscale entend remettre en cause le remboursement de la TVA obtenu par la société et lui notifie un rappel de taxe correspondant. En effet, en se fondant sur les informations recueillies lors des vérifications de comptabilité des deux fournisseurs, elle estime que ces factures présentent un caractère fictif.
La problématique est relative à deux obligations procédurales s’imposant à l’administration fiscale lors de redressements dont la mise en œuvre est fondée sur des renseignements obtenus de tiers. Il s’agit d’une part d’informer le contribuable de l’origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers sur lesquels l’Administration s’est fondée pour établir l’imposition issue du redressement (que la procédure d’imposition soit contradictoire ou d’office), et d’autre part de mettre à disposition du contribuable à sa demande les documents ou copies de documents contenant les renseignements qu’elle a utilisés pour procéder aux redressements avant la mise en recouvrement des impositions. Ces obligations d’origine jurisprudentielle sont aujourd’hui consacrées par l’article L. 76 B du Livre des procédures fiscales (LPF) [3].
Par une décision du 22 février 2017 mentionnée aux tables du recueil Lebon, le Conseil d’État rappelle ces deux obligations procédurales (I) et poursuit en indiquant que l’obligation de mise à disposition des documents ou copies de documents au contribuable qui les demande ne peut porter que sur des documents effectivement détenus par les services fiscaux. L’apport de cette décision concerne l’hypothèse de documents non détenus par l’administration fiscale : l’autorité fiscale devra d’une part en informer le contribuable afin de le mettre en mesure de demander communication desdits documents au tiers, et d’autre part porter à sa connaissance l’ensemble des renseignements recueillis et fondant l’imposition (II).
En l’espèce, il a été considéré que la procédure était régulière puisque le requérant avait été informé par l’autorité fiscale que cette dernière avait, au cours de la vérification de comptabilité des deux fournisseurs, pris connaissance de documents comptables et relevés bancaires des fournisseurs ne faisant apparaître aucune opération effectuée avec la société requérante, mais également qu’elle ne détenait pas ces documents. La cour administrative d’appel n’avait donc commis aucune erreur de droit en déduisant de ces constatations que la société requérante avait été informée de l’origine et de la teneur précise des renseignements ainsi utilisés.
Une particularité factuelle réside dans cette affaire : elle tient en ce que ces documents n’existent pas véritablement puisque la réalité des factures a été remise en cause selon l’Administration par le fait que les opérations de prétendus achats de la société requérante n’apparaissaient pas dans les documents comptables et relevés bancaires des fournisseurs. Le renseignement est en quelque sorte « vide ». L’étude de cet arrêt sera l’occasion pour le lecteur d’un retour sur la construction jurisprudentielle entourant l’article 76 B du LPF.