Dans un arrêt en date du 22 septembre 2011, la Cour de cassation avait apporté une nouvelle limite dans le champ d’application du secret professionnel des avocats. Elle a en effet jugé que ne sont pas couverts par le secret professionnel les documents faisant l’objet d’un échange entre un avocat et son ordre.
Cette décision a connu de vives critiques de la part du Conseil National des Barreaux (CNB). En effet la commission règles et usages a été saisie et a rendu un rapport dans lequel elle propose de couvrir par le secret professionnel les échanges entre l’avocat et son ordre.
Le CNB, lors de sa dernière assemblée générale en date du 14 septembre dernier, a proposé plusieurs amendements à la loi de 1971 afin de garantir aux avocats un secret professionnel élargi. Voici un résumé des amendements proposés par le CNB :
- Nouvelle rédaction de l’article 66-5 qui précise que désormais le secret professionnel s’entend aussi dans les relations entre l’avocat et ses clients. Le secret professionnel est d’ordre public, général, absolu et illimité dans le temps : « L’avocat est tenu au secret professionnel, fondement de la relation de confiance avec le client. Le secret professionnel est d’ordre public, général, absolu et illimité dans le temps. Il existe en toutes matières, que ce soit dans le domaine du conseil, de la représentation, de l’assistance ou de la défense. Il s’applique à toutes les informations relatives au client et aux affaires qu’il a portées à la connaissance de l’avocat ou dont l’avocat a eu connaissance dans l’exercice de sa profession. Le secret professionnel couvre tous les échanges entre l’avocat et son client et les documents de travail, notamment les correspondances, les consultations, les notes d’entretien, agendas, relevés de diligences, notes d’honoraires et, plus généralement, toutes informations fournies ou intéressant le client, les pièces du dossier, quel qu’en soit le support, y compris dématérialisé, en quelque lieu qu’ils se trouvent ».
- Création d’un nouvel article 66-5-1 qui précise les cas dans lesquels il est possible de porter atteinte à la confidentialité : « Le secret professionnel de l'avocat fonde la confidentialité des échanges entre avocats sous quelque forme et quelque support que ce soit. Il en est de même pour les échanges entre l’avocat et le bâtonnier, entre l’avocat et les instances professionnelles, dès lors qu’ils font référence à des éléments couverts par le secret professionnel. Ces dispositions ne font pas obstacle aux correspondances ou documents qui peuvent avoir un caractère officiel dès lors qu'ils en portent expressément la mention, et qu’ils ne se réfèrent à aucun échange confidentiel antérieur ou sont équivalents à un acte de procédure ».
- Création d’un nouvel article 66-5-2 : « Les dispositions de l’article 66-5 ne font pas obstacle, à compter de la conclusion d'un contrat de fiducie, à l’application à l'avocat qui a la qualité de fiduciaire, de la réglementation spécifique à cette activité, sauf pour les correspondances, dépourvues de la mention "officielle", adressées à cet avocat par un confrère non avisé qu'il agit en cette qualité. Elles ne font pas obstacle à l'obligation pour un avocat de communiquer les contrats mentionnés à l'article L 222-7 du code du sport et le contrat par lequel il est mandaté pour représenter l'une des parties intéressées à la conclusion de l'un de ces contrats aux fédérations sportives délégataires et, le cas échéant, aux ligues professionnelles qu'elles ont constituées, dans les conditions prévues à l'article L 222-18 du même code ».
Ces dispositions permettent de distinguer le secret professionnel de la confidentialité, dont la frontière entre les deux était jusqu’alors trop floue. Le CNB propose également d’étendre cette réforme sur le plan pénal, en modifiant l’article 432 du Code de procédure pénale afin de supprimer la possibilité de rapporter une preuve résultant de la transcription à l’écrit d’une conversation orale entre un avocat et son client, notamment les écoutes téléphoniques.
Tracfin, la cellule de Bercy en charge de la lutte contre le blanchiment d’argent, demande aux avocats, lorsqu’ils ont un doute sur la transparence d’une opération financière, de transmettre à Tracfin une déclaration de soupçons. Ce dispositif ne connaît pas de succès auprès des avocats. Preuve en est, une seule déclaration de soupçons a été enregistrée pour l’année 2011 ! Les avocats considèrent en effet que ce mécanisme porte atteinte au secret professionnel ainsi qu’à la confidentialité des échanges.
On attend aujourd’hui la publication de la quatrième directive de lutte contre le blanchiment d’argent, en cours de rédaction.