En vertu du décret du 27 novembre 1991 organisant la profession d’avocat, le bâtonnier a un pouvoir d’enquête lui permettant de contrôler le comportement des avocats de son ordre.
Il ressort des termes de l’article 187 du décret de 1991 que « le bâtonnier peut, soit de sa propre initiative, soit à la demande du procureur général, soit sur la plainte de toute personne intéressée, procéder à une enquête sur le comportement d'un avocat de son barreau. Il peut désigner à cette fin un délégué, parmi les membres ou anciens membres du conseil de l'ordre. Lorsqu'il décide de ne pas procéder à une enquête, il en avise l'auteur de la demande ou de la plainte.
Au vu des éléments recueillis au cours de l'enquête déontologique, il établit un rapport et décide s'il y a lieu d'exercer l'action disciplinaire. Il avise de sa décision le procureur général et, le cas échéant, le plaignant.
Lorsque l'enquête a été demandée par le procureur général, le bâtonnier lui communique le rapport.
Le bâtonnier le plus ancien dans l'ordre du tableau, membre du conseil de l'ordre, met en oeuvre les dispositions du présent article lorsque des informations portées à sa connaissance mettent en cause le bâtonnier en exercice. »
Le bâtonnier dispose donc d’un véritable pouvoir d’enquête lui permettant de mener à bien son action de contrôle du comportement des avocats de son ordre.
En l’espèce, un avocat loue des locaux professionnels dans le cadre de l’exercice de sa profession. Suite à plusieurs loyers impayés, le bailleur du local saisit le bâtonnier. Le barreau de Papeete a prononcé à l’encontre de l’avocat une interdiction d’exercer la profession pour une durée de deux ans. Or la procédure parait irrégulière. En effet le bâtonnier a procédé à une véritable visite domiciliaire en s’introduisant au cabinet de l’avocat, alors que ce dernier était absent, afin de procéder à des opérations de contrôle. Il a en outre eu accès à des documents comptables, fiscaux et interrogé plusieurs salariés
Il convient donc de préciser les limites des prérogatives du bâtonnier en matière d’enquête.
Le pouvoir d’enquête du bâtonnier sur le comportement d’un avocat lui confère t-il le pouvoir d’effectuer une visite domiciliaire chez un avocat ?
La Cour de Cassation protège les prérogatives du bâtonnier et déclare la procédure régulière : « Mais attendu que le bâtonnier tient des dispositions de l’article 187 du décret n091-1197 du 27 novembre 1991 la faculté de faire procéder ou de procéder lui-même, de sa propre initiative à une enquête sur le comportement d’un avocat de son barreau ».
En définitive, la Cour de Cassation considère que l’enquête déontologique relève du pouvoir souverain du bâtonnier et en déduit, d’une part, la régularité de la visite domiciliaire, d’autre part, la validité de la procédure de sanction disciplinaire éventuellement engagée sur le fondement des résultats de cette visite.
C’est pourquoi certains auteurs de doctrine s’interrogent sur la compatibilité du pouvoir de sanction du bâtonnier et de ses prérogatives de conseil et de protection des avocats de son ordre.
Le bâtonnier peut-il être garant de la protection de la profession lorsqu’il détient sur les avocats les pouvoirs d’un véritable « procureur disciplinaire » selon Y. Laurin ?
- Y. Laurin, « Le bâtonnier, procureur disciplinaire », Dalloz 2003