Manque de consultation des professions concernées, manquement à certaines libertés fondamentales, marchandisation du droit, les professions du droit sont en colère envers un projet de loi Macron qu’ils jugent « inacceptable ». Ces dernières ne sont pas les seules à critiquer l’opportunité du texte. Mardi dernier, le Conseil d’Etat, tout en rendant un avis favorable au texte, a pointé du doigt plusieurs lacunes. La haute juridiction administrative a notamment déploré « les graves insuffisances de l’étude d’impact » du projet de loi. Elle précise que le gouvernement ne peut modifier les conditions d’installation des professions en question, sans instaurer « une progressivité suffisante », ou un « dédommagement adéquat », sous peine d’enfreindre les principes d’égalité devant les charges publiques et la garantie des droit prévus par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789. Le Conseil d’Etat préconise un mécanisme d’augmentation progressive du nombre d’offices, notamment par l’abolition du numerus clausus. L’avis prévoit par ailleurs de donner un rôle consultatif à l’autorité de la concurrence.
C’est aujourd’hui aux alentours de 12h00 que le ministre de l’économie a pris la parole. « Mon ambition est de redonner plus d’égalité d’accès », a-t-il expliqué à titre d’introduction avant de préciser que « cette loi n’enlève rien à personne. Nous n'enlevons pas de droits, nous en créons d'autres pour celles et ceux qui en ont besoin ». Sur la question des professions juridiques, Emmanuel Macron se veut rassurant « Nous ne voulons pas marchandiser le droit ». Concernant les professions juridiques, il a rappelé les trois points majeurs de la réforme. Il souhaite tout d’abord faciliter l’accès à ces professions, pour les rendre « plus justes ». Le ministre de l’économie souhaite également baisser les tarifs dès lors que cela est possible, afin que ceux-ci reflètent mieux les couts réels. Enfin, Bercy souhaite ouvrir le capital entre professionnels du droit. « Nous devons aller vite, parce que la situation de notre pays l’impose. Nous devons rendre notre économie plus forte et plus efficace », précise-t-il.
Concernant le controversé statut d’avocat salarié en entreprise, la question à été soulevée par la garde des Sceaux. Celle-ci a notamment pris l’engagement de répondre à la question que pose ce statut, précisant que la profession d’avocat est elle-même divisée à ce sujet. « Il faut poser des principes et des règles qui soient conformes en matière d’égalité de traitement entre les avocats en entreprise et les avocats qui seront hors entreprises », a-t-elle expliqué avant de préciser que les parlementaires auront l’occasion de s’emparer du sujet. Dans la même dynamique que le ministre de l’économie, Christiane Taubira souhaite rassurer, « certaines inquiétudes, qui ont été émises avant même que le travail interministériel n’ait eu lieu, ne sont aujourd’hui plus fondées ».
Ni apaisées, ni rassurées, les professions du droit ont manifesté de concert leur colère cet après-midi dans les rues de Paris (voir l'article « Justice morte » : mercredi rouge pour les professions juridiques). Elles ont par ailleurs eu l’occasion d’expliquer le fondement de leurs inquiétudes à la garde des Sceaux qui les recevait en fin d’après-midi.
Capucine Coquand, Responsable éditorial pour Carrières-Juridiques.com