Hausse du salaire, indépendance, reconnaissance, sommet de la hiérarchie : le statut d’associé, perçu par les collaborateurs comme l’ultime consécration, offre de nombreux privilèges. Pourtant, être un bon avocat ne suffit pas pour y parvenir : il faut souvent savoir se dépasser, se différencier des autres et développer des compétences supplémentaires. « La base même du collaborateur est d’avoir une excellente technique. Mais il faut également savoir sortir de cet environnement juridique pour apporter à ses clients des réponses commerciales et stratégiques », explique Arnaud de La Cotardière, managing partner chez
Linklaters.
En d’autres mots, un associé n’est pas seulement un excellent juriste, il est aussi un commercial averti et un entrepreneur et manager dans l’âme. « Il est très important de se mettre dans la peau de ses clients et d’avoir un minimum de connaissances en communication, économie, gestion, comptabilité, etc. », précise-t-il. Le management est également un travail à temps plein : « Une autre qualité requise est de savoir s’entourer des meilleures équipes et de créer une grande cohésion entre elles. »
Traditionnellement, l’associé occupe toutes les fonctions dans le cabinet : un rôle prenant et lourd en responsabilités qui ne sied pas à tout le monde. Mais de nos jours, les fonctions se répartissent mieux au sein
des structures : le pilotage est confié à un seul associé, les fonctions support se développent... Malgré tout, « l’associé est souvent vu comme un homme-orchestre qui fait tout », constate Xavier Marchand, associé chez Carakters Avocats, cabinet dont il est également le fondateur.
FUTURS ASSOCIÉS : DÉVELOPPEZ VOTRE CLIENTÈLE
Happés par leurs dossiers, une grande majorité des jeunes avocats ont tendance à oublier le côté libéral de la collaboration dont la vocation est de les aider à développer une clientèle solide pour accéder au statut d’associé. Pour ce faire, certaines stratégies simples, rapides et efficaces sont faciles à mettre en oeuvre : imprimer des cartes de visite personnelles, être visible sur les réseaux sociaux ou encore rédiger des articles pour légitimer sa spécialité et participer à des conférences.
UN STATUT DIFFICILE D’ACCÈS
Cette position tant enviée se mérite : une dizaine d’années sont nécessaires pour troquer le costume de collaborateur contre celui d’associé. Résultat, de moins en moins de jeunes avocats accèdent à l’association. Pour Arnaud de La Cotardière, la concurrence grandissante n’est pas seule en cause : « Chacun sait qu’être associé représente beaucoup de responsabilités, de stress, et que cela prend énormément de temps. »
Si certains ne veulent pas se soumettre aux contraintes du statut, d’autres ont tout simplement des aspirations différentes. « L’association dans une structure de taille importante ne correspond pas à tout le
monde : il faut bien déterminer ce dont on a envie et avoir un souhait entrepreneurial », souligne Clémence Fallet, associée chez Bredin Prat. « Certains préfèrent monter leur propre cabinet ou devenir associé dans un cabinet de plus petite taille », conclut-elle.
Et ceux qui veulent devenir associés sans y arriver ? « Si votre cabinet ne vous a pas proposé l’association vers 40 ans, cela veut dire qu’ils n’ont pas jugé utile de le faire », estime Xavier Marchand. On souhaite ou non être associé et en supporter les plaisirs et les vicissitudes.
QUEL STATUT POUR LE COUNSEL ?
Counsel, of counsel, senior counsel… Parmi cette myriade de titres, il est parfois difficile de déterminer le rôle exact du counsel. Collaborateurs cooptés en interne après plusieurs années d’exercice ou avocats seniors qui ont rejoint tardivement la structure, ils ont tous une chose en commun : ils ne sont ni de simples collaborateurs, ni des associés. Selon Yves Boissonnat, fondateur de Boissonnat Partners et grand nom de l’executive search, le statut de counsel n’est pas forcément une porte d’entrée assurée vers l’association.
« À la base, ce statut a été créé pour faire patienter les collaborateurs qui ne pouvaient pas devenir associés tout de suite. C’était un moyen de reconnaître le travail des collaborateurs les plus jeunes en faisant miroiter l’idée qu’ils deviendraient associés plus tard. » Une sorte de « rampe de lancement » qui peut également être vue comme une « voie de garage » : « On reconnaît que l’avocat est plus qu’un collaborateur mais qu’il n’a pas encore toutes les qualités pour être associé », résume Yves Boissonnat. « Certains sont aussi counsels parce qu’ils le veulent, et qu’ils ne désirent pas être associés. »
Mathilde Pujol